La famille Ogé-Boussard de Lironville.

 

Sur le monument aux morts de Lironville, parmi toutes les victimes de la première guerre mondiale, figurent Alfred Boussard et Emma Boussard, un frère et une soeur sortis de l'oubli par Jean-Pierre Souquières, descendant de la famille Ogé-Boussard et auteur de ce récit familial.

Le père d'Emma et Alfred Boussard est natif de Royaumeix, Nicolas (dit Alphonse) Boussard issu d'une famille d'agriculteur épouse en 1880 Anne Élisabeth (dite Élise) Maujean dont les parents sont épiciers à Manonville. Le jeune couple s'établit rue Grande rue à Lironville, lui comme scieur de long, son épouse comme patronne sage-femme, celle-ci exercera jusqu'à l'invasion allemande en septembre 1914. À Lironville naîtront de cette union trois enfants :

  1. Alfred, né en 1881, employé de commerce, il est mobilisé en 1914 au 168e régiment d'infanterie. Il décède le 2 août 1915 des suites de ses blessures de guerre à l'hôpital Dominique Larrey de Sainte-Menehould (Marne). Il est inhumé à la Nécropole Nationale à Sainte-Menehould (Marne). Mort pour la France, son nom est gravé sur le monument aux morts de Lironville et sur celui de Dogneville (Vosges).
  2. Alphonsine née en 1882, elle exerce la profession de couturière jusqu'à son mariage avec Félicien Grunenwald patron cultivateur laitier à Dogneville (Vosges). Alphonsine personnage honorablement connue à Dogneville, restera fermière laitière jusqu'en 1960.
  3. Emma née en 1885, comme pour sa sœur elle exerce la profession de couturière. La famille s'étant agrandie à partir de 1885, elle s'installe rue de l'Église à Lironville. C'est là qu'elle rencontre Victor Ogé (dit Émile) lui même résidant avec ses parents rue de l'Église. Les parents du futur sont propriétaires cultivateurs, le père Jean Baptiste Ogé (dit Camille) et la mère Marie Jeanne Heymonet, vieille famille de Lironville, ont deux enfants nés à Lironville, l'aîné Edouard et le cadet Victor (dit Émile). Le mariage a lieu en 1908 et le couple s'installe rue haute comme patron cultivateur. Naîtrons à Lironville quatre enfants Albert, Félicien, Jules (décédé en 1912 à 43 jours) et Edmond.

En août 1914, la France entre en guerre, c'est la mobilisation générale, début septembre 1914 la bataille en Meurthe-et-Moselle fait rage, Lironville est menacé. Beaucoup d'habitants quittent le village, mais certains restent, il y a les biens mais surtout les animaux de la ferme d'où les pertes d'hommes et de femmes civils. La France est agricole !
Dans la famille Ogé - Boussard Victor a été mobilisé le 2 août 1914, les femmes sont seules avec les enfants, elles décident de quitter Lironville, elles partiront en exode entre le 5 et le 20 septembre 1914, leurs animaux sont en partie du voyage ou ont été pour certains confiés aux habitants ne voulant pas quitter leur domicile.
La famille va se réfugier rue du Ruisseau à Dogneville, commune des Vosges où Alphonsine la sœur d'Emma y est installée depuis son mariage comme fermier laitier avec son époux Félicien Grunenwald. Celui-ci aussi mobilisé n'est plus à la ferme.
Avec le tombereau surchargé, le voyage fait à pieds sera long, 120 kilomètres séparent les deux localités. Fait partie du voyage Élise Maujean la mère d'Emma, d'Alphonsine et d'Albert, elle-même en 1914 domiciliée à Lironville où elle était sage-femme. Elle vient, comme réfugiée, habiter à Dogneville chez sa fille Alphonsine et ne repartira plus à Lironville.
C'est à Dogneville, rue du Ruisseau,qu'Emma est tuée par fait de guerre en 1916. c'est pourquoi son nom est aussi gravé, comme victime civile, sur le monument aux morts de Lironville.
Si Dogneville n'a pas été bombardée directement par l'armée allemande car trop loin du front et qu'il n'y a pas eu de combat durant toute la période de guerre à Dogneville, Emma a probablement perdu la vie pendant un bombardement aérien allemand, ou fut grièvement blessée par un tir de mitrailleuse lors d'un raid aérien. Chaque mois de l'année 1916 des raids meurtriers de l'aviation allemande auront lieu sur la station de la radio militaire à Chantraine (commune qui jouxte Épinal) et sur les nombreuses casernes d'Épinal. Le fort et le terrain d 'aviation de Dogneville étaient des cibles stratégiques. À cette époque, dans les fermes, les enfants et les femmes gardaient les vaches à la pâture et Emma a pu être gravement blessée dans de telles circonstances.,

Après la guerre, Victor (dit Émile), démobilisé, s'est installé provisoirement à Dogneville avec ses trois enfants, il ne peut pas revenir immédiatement à Lironville, le village ayant été complétement détruit. Veuf, il a fait connaissance d'une jeune femme de la commune. En février 1920 il épousera à Dogneville en seconde noce Marie Prévôt puis la même année le couple revient s'installer sur la propriété familiale, 8 rue de l'Église à Lironville, Victor (dit Émile), est patron cafetier et agriculteur. La nouvelle famille au complet est repartie à Lironville, Albert 12 ans, Félicien 11 ans, et Edmond (dit Monmon) 8 ans. Le couple recomposé en 1922 aura un enfant né à Lironville, Marcel Édouard qui épousera en 1944 Marcelle Carême, une fille de Mamey.

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Albert le fils aîné, fonde à Arles en 1931 une famille avec Clarisse Boniface, il sera salarié poudrier à la Poudrerie National de Saint-Chamas (Bouches-du-Rhône) et sera gravement blessé lors de l'explosion de la poudrerie du 16 novembre 1936 qui fit 53 morts et 200 blessés.

Félicien épouse Claudine Grunenwald, à Dogneville (Vosges) en 1935. Il embrasse la carrière militaire. Félicien participera à la campagne du Maroc de 1929 à 1932.
Médaille coloniale agrafe Maroc et Sahara le 11 juin 1931, Médaille Croix de Guerre des T.O.E. avec une étoile de bronze le 11 mars 1932.

Edmond le benjamin de la fratrie, épouse Jeanne Kiffer à Dogneville. Il fait aussi une carrière militaire au 120e régiment d'artillerie d'Épinal. Arrêtée par un accident en service, il fera carrière comme patron transporteur routier.

Chaque année après 1921 une délégation est venue de Lironville rendre un hommage au monument aux morts de Dogneville, puis au cimetière. Cette délégation partageait un repas familial chez Alphonsine Boussard. Cette commémoration prend fin au décès en 1960 de Victor OGÉ.

Victor OGÉ vers 1950