Mai 1915 : Grands travaux.

Après le déplacement des combats sur le secteur de Regniéville Remenauville, le génie mobilise de nombreux bataillons des régiments territoriaux pour aménager les tranchées, et organiser des voies d'accès sécurisées. C'est ainsi que l'on découvre qu'au nord-ouest de Mamey, pour passer du bois la Lampe au bois Brûlé, la construction d'un tunnel passant sous la route de Limey à Pont-à-Mousson a été entrepris en mars 1915 et il est sur le point d'être réalisé.

Le 7 mai dans le journal du génie de la 73e division on peut lire que le tunnel est terminé, que des voitures peuvent l'emprunter et que les travaux avaient débuté le 15 mars.

Où est ce tunnel aujourd'hui ?

Pour approvisionner le front, il est décidé au génie du 12e corps d'armée d'aménager une voie Decauville entre St Jean et les Quatre Vaux.  Paul Decauville, un ingénieur, industriel et homme politique français, né en 1846 est l'inventeur d'un système de voie ferrée étroite qui porte son nom. Ce chemin de fer dont il ne reste plus aujourd'hui que le tracé surélevé au dessus du ruisseau de la vallée des Quatre Vaux était surnommé le tacot.

Récapitulatif des travaux du génie sur le secteur.

Du côté des combats c'est toujours au bois le Prêtre qu'ils sont les plus violents et meurtriers. L'objectif est toujours le même, enlever aux Allemands la totalité du Quart en Réserve. 

Il faudra encore tout un mois de combat avec attaque et contre attaque pour que la 73e division réalise cet objectif. Lors des combats c'est la supériorité des Allemands dans l'emploi des grenades qui leur permet de bien résister.

Le 18 mai le QG de la 73e division s'installe à Marbache

Dans les violents combats de la mi-mai c'est toujours l'approvisionnement en grenades qui suscite des inquiétudes.

 

et cela jusqu'à la fin du mois.

Le 9 mai le 138e RI s'installe dans le secteur de Limey. Son action s'exerce sur Regniéville et  Remenauville,  l'objectif et de garder coûte que coûte les positions acquises.

Sur Mort-Mare, à la Première Armée on se félicite du succès de l'attaque du premier mai et on attribue ce succès à  la répression qui a touché fin avril le 63e régiment d'infanterie.

Mais là aussi le déficit en grenade est déploré.

Le génie de la Première Armée semble sensibiliser à ce déficit en grenades et organise des expériences aux usines de Foug.

De l'usine de Foug vont sortir les célèbres grenades C.F. (Citron Foug) et quelques grenades à main inspirées de celles des Allemands.

 

21 mai : La 73e division récupère la 146e brigade et étend son secteur à l'ouest de Fey en Haye

Le 26 mai un détachement d'un corps de volontaire crétois est mis à disposition de la 145e brigade (JMO 73e division p 38) Cette arrivée de soldats grecs semble être un événement particulier que tous les JMO mentionne. Ce détachement de Crétois est affecté au 346e Régiment d'infanterie.  

On relève dans le journal du service de santé de la 73e division que seul le médecin qui accompagne ce détachement parle le français mais imparfaitement.

Le 29 mai le général Méric  se rend à Mamey et passe le commandement du secteur au général Proye commandant la 45e brigade dont l'État-major s'installe  à Mamey. 

Journal d'Henri Cazin.

Mai 1915
Jeudi 6 : « Nous quittons Pont-à-Mousson et remontons à Montauville. Nous logeons à un vieux moulin délaissé, dans une grange très spacieuse. Ça sent la guerre ici plus qu’à notre logement d’hier. Nos canons tonnent en avant et en arrière et de temps en temps les réponses qui pour nous sont plus que dangereuses. La campagne est superbe. Les bois ont pris leur belle couleur vert tendre. Un morceau de vigne tout proche, bien entretenu, permet toutes les espérances. Les nouvelles des tranchées sont bonnes, nos attaques ont réussi et nous avons une avance à signaler. Si mince que soit le résultat, il a sa valeur, c’est de bon augure. Un prisonnier allemand déclare que 20 000 des leurs vont être amenés pour reprendre le quart en réserve ».

Jeudi 13 : « La nuit a été terrible, on dit que notre gain n’a pu être maintenu, nous avons beaucoup de blessés. L’ennemi a contre-attaqué toute la nuit en force. Ce soir, au crépuscule, la fusillade s’est tout à coup déchaînée, puis les canons entrent dans la danse et pendant une demi-heure le plus terrifiant bruit de bataille nous casse les oreilles ».

Vendredi 14 : « […] Ici c’est toujours dur, dans les deux derniers jours le 169e a eu près de mille hommes hors de combat. Une attaque est projetée pour demain matin par le 167e ».

Samedi 15 : « Journée mouvementée, les nouvelles sont mauvaises. Nous avons perdu le terrain conquis et les pertes sont sévères. Beaucoup de blessés. On s’étonne qu’aux attaques comme celle-ci, les renforts ne suivent pas immédiatement. Ce soir on annonce une nouvelle avance. Le 167e est attaqué, le 158e est monté. Nous devons changer de cantonnement, les ordres ne sont pas encore précis. Je viens de voir 60 prisonniers allemands, la plupart ont le sourire et ont l’air tranquilles sur leur sort. Ils ne sont pas à plaindre ».

Dimanche 16 : « Quelques contre-attaques ennemies sont repoussées. Les nouvelles sont meilleures, nous serions en possession du terrain perdu. Nous sommes cette fois-ci prévenus d’avoir à quitter Montauville cette nuit pour aller cantonner à Jezainville ».

Mardi 18 (Jezainville) : « Nous avons hier pris possession de notre cantonnement dans une maison qui a reçu un obus. La cuisine est petite et fume à ne pas y tenir ; cela ne fait rien, c’est la guerre » !

Vendredi 21 : « […] Un détachement de 600 hommes arrive pour reformer le 169e. Les nouvelles d’Italie sont plus favorables. La Chambre italienne vote son acceptation à l’intervention possible. Quand ce ne serait qu’au point de vue moral, l’effet est satisfaisant. Ayant appris que le fils Dutertre et René Drussy étaient à la 12e Compagnie, je m’y rends prendre des renseignements. Hélas, je n’ai pas de chance pour mes petits compatriotes […]. Drussy est évacué, me dit un sergent et Dutertre est tué... ».

Mercredi 26 : « La ville est furieusement bombardée. Un obus de gros calibre tombe rue des Prêtres à une cinquantaine de mètres blessant grièvement deux petits enfants, il est dix heures et quart. Un autre, rue du Four, tue une femme et fait plusieurs blessés tant civils que militaires. Ordre est donné de descendre dans les caves au premier bombardement nouveau ».

Jeudi 27 : « Après une matinée calme, nous subissons le plus furieux bombardement qu’ait encore reçu Pont-à-Mousson, vers 6 heures les obus arrivent par rafales serrées. Des ordres ont été donnés pour que tout le monde se mette en sécurité. Une attaque faite à la Croix des Carmes laissait prévoir le bombardement de la ville puisque, règle générale, l’ennemi se venge ainsi de ses échecs ».

Samedi 29 : « Journée plus calme. Quelques grosses marmites l’après-midi, c’est tout ! Les grandes voitures automobiles sont reparues afin d’emmener les personnes de la ville qui évacuent. Il y en a sept qui peuvent emmener plus de 100 personnes ».

Lundi 31 : « Nous quittons Pont-à-Mousson pour Montauville. Nous reprenons notre cantonnement au moulin. Le pays est bombardé souvent et sérieusement. Le régiment a encore subi des pertes importantes, surtout en blessés. J’apprends à l’arrivée que Leloup est blessé. Après une attaque réussie nous reperdons le terrain gagné ».

http://lagrenouillememoire.blogspot.fr/2014/01/la-guerre-de-1914-1918-vecue-par-henri.html