Juin 1915 : Visite du Président de la République.
Le 7 juin 1915, Raymond Poincaré qui a été élu Président de la République en 1913 vient se rendre compte de la situation dans la région. S'est-il arrêté à Mamey ? Rien de permet de le dire mais le JMO du 12e corps d'armée nous dit qu'il s'est rendu à l'observatoire Mondain. Mondain est le lieutenant colonel à la tête du 169e RI.
Cet observatoire doit être situé vers le point le plus élevé près de Fey à la cote 359.
Est-ce cet endroit ? Ici il se fait expliquer la situation par le général Lebocq qui commande la 73e division. Il est accompagné du général Roques qui dirige la Première Armée et du général Dubail qui supervise les armées de l'Est.
Il se rend ensuite à Montauville et au bois le Prêtre avec les généraux Dubail, Roques, Lebocq et Riberpray.
Ici avec le général Riberpray qui dirige la brigade active de Toul.
Le lendemain les combats reprennent sur le Bois le Prêtre. Exécution de l'ordre d'attaque n°354 du Général Lebocq en date du 7 juin 1915. Cette attaque va permettre la prise de la Croix des Carmes. Deux bataillons (du 167e et du 346e) vont contribuer à arracher ce terrain aux Allemands. Ce sera le point culminant des attaques au Bois le Prêtre.
La croix va miraculeusement être épargnée par les combats, elle va rapidement être mise à l'abri et transportée au cimetière du Pétant.
Après la conquête du secteur de la Croix des Carmes, le général Dubail qui commande le groupe des armées de l'Est demande le 9 juin à la 73e division de se tenir sur une stricte attitude défensive. Les grandes attaques ne seront plus à notre initiative et les moyens en artillerie canons et munitions vont être réduits.
Le 10 juin les premiers canons sont retirés.
Les Allemands ne mettront que quelques jours à se remettre de leurs déconvenues. Le 11, les bombardements allemands reprennent et leur intensité augmente le 12 juin et on lit dans le JMO de la division "Ce bombardement a bouleversé beaucoup de nos tranchées, au point que le Général Cdt la brigade active a pu un moment considérer la situation comme devenue critique." Le 14 juin, il est noté "depuis 4 jours nous avons journellement une centaine d'hommes mis hors de combat" (JMO p 60)
Dans le secteur du Mouchoir une tentative faite par une dizaine de crétois pour enlever un poste allemand près de la tranchée de Vilcey a échoué. (JMO de la 73e division)
Ce bataillon est passée en revue par le Président de la République lors de sa visite au Bois le Prêtre.
Le bataillon crétois est retiré le 20 juin.
Les 18 et 19 juin, les Allemands déclenchent un bombardement d'une intensité redoutable, entraînant à nouveau de sévères pertes, mais aucune attaque d'infanterie ne suit.
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La guerre de tranchée est cependant loin d'être terminée et il faut s'adapter aux combats avec de nouvelles armes. Un nouveau type de grenade est mis au point, ce sont les grenades F1. On étudie aussi la possibilité de fabriquer des lances flammes et on continue les recherches sur les gaz asphyxiants.
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Dans les cantonnements situés en forêt, le problème de l'eau se fait sentir à l'approche de l'été comme à Jonc Fontaine en forêt de Puvenelle. La recherche de ponts d'eau va devenir un nouveau souci.
Durant ce mois de juin on assiste à une grande réorganisation des unités combattantes sur le secteur. Début juin le 12e Corps d'Armée quitte la région pour le Nord avec toutes ses unités (23e et 24e divisions). C'est la 65e division qui relève le 12e CA, elle fonctionne comme division isolée et installe son QG à Domèvre. L'état-major de la 45e brigade quitte Mamey pour Amiens et va laisser la place à celui de la 129e brigade (302e, 311e et 312e régiments).
Le 8 juin arrivent les 5e et 6e compagnies du 312e régiment à Mamey.
Le 10 juin la 65e division a terminé sa relève du 12e corps d'armée. Le 13 juin le général commandant la 129e brigade s'installe à Mamey.
Le 14 juin la brigade active de Toul dirigé par Riberpray va désormais former la 128è division qui se compose de 2 brigades, la 256e brigade (100e RI et 169e RI) et la 255e brigade (167 et 168e RI).
Elle se déploie momentanément sur le secteur de Limey Fey.
Le général Dubail vient pour cette occasion rencontrer le général Riberpray
Le 30 juin 1915 la toute nouvelle 128e division que commandera le Général Riberpray, quitte la Lorraine pour le front de l'Argonne. Elle est remplacée par par la 16e division coloniale dont on n'a malheureusement pas de JMO et c'est la 31e brigade coloniale qui s'installe sur le secteur de la Croix des Carmes et du Quart en Réserve.
Journal d'Henri Cazin.
Juin 1915
Mardi 1er : « […] Les nouvelles des journaux sont assez bonnes sur tous les fronts. Les Russes paraissent se venger de leur recul ».
Jeudi 3 : « Duel d’artillerie, combat d’aéroplanes, l’avion ennemi pourvu d’une mitrailleuse, le nôtre s’éclipse aussitôt. Combat de grenades et de crapouillots, raquettes, etc. Beaucoup de blessés descendent encore ».
Lundi 7 : « […] Dans la soirée, la ville de Pont-à-Mousson et les pays environnants, Blénod, Maidières et Boseville sont soumis à un bombardement en règle. Des incendies s’allument et on compte des victimes, une trentaine dont quelques tués ».
Mardi 8 : « […] Une sérieuse attaque de notre part a lieu à la Croix des Carmes que le président de la république a visitée le matin. On n’en connaît pas le résultat ».
Mercredi 9 : « […] le tonnerre gronde et remplace le bruit des canons entendu hier. Monté sur le versant nord du coteau dominant le village du côté sud-ouest, j’ai suivi des yeux le
bombardement. L’ennemi répondait rigoureusement et balayait les côtes de Xon et de Mousson, marmites et fusants éclataient simultanément à de courts intervalles. L’attaque d’hier a été menée par les Grecs du 1er Étranger, dirigés et appuyés par une compagnie du 168e. Bon
résultat et pertes absolument insignes. La Croix des Carmes est enlevée et nous occupons la route de Norroy. Je renouvelle seul ma promenade sur la côte de
Cuite, je ne me lasse pas d’admirer le panorama qui se déroule à perte de vue en face et à droite ».
Lundi 14 : (quittant Jezanville) « […] À notre départ les obus de 77 tombent sur le village et nous suivent au départ. Les premiers projectiles percutants tombent devant nous et à droite, nous quittons la route et le tir heureusement n’est pas suffisamment allongé car il est précis en direction et les fusants éclatent à 100 mètres derrière nous. Nous suivons au plus court la vallée de l’Ache, très encaissée à certains endroits. Nous passons à Griscourt, Villers en-Haye, nous laissons sur la droite Rosières-en-Haye pour atteindre Seizerais, puis arrivons à Liverdun à 6 heures le soir. Avant l’arrivée, un splendide panorama s’offre à la vue sur le sud-ouest. On a vue sur le fort St-Michel au bas duquel s’étale la ville de Toul. La vallée de la Moselle se rétrécit jusqu’à Liverdun et fait une boucle autour du pays très agréablement situé. Nous dévalons plus vite que ne le demanderaient nos jambes fatiguées avec de nombreux détours jusqu’à une usine de nettoyage située près le pont du chemin de fer sur le bord de la Moselle. Ici, c’est la vie calme. On semble revenu en pays civilisé en voyant passer les trains pour Toul et Nancy, pleins de voyageurs civils et militaires ».
Mercredi 16 : « La concierge de l’usine, très aimable, s’en remet à nous pour la bonne tenue de l’établissement et nous aide dans la mesure de ses moyens pour faciliter notre installation. Très causeuse, elle vient à la cuisine tailler une bavette. Voilà plus de six mois que je n’ai tenu aussi longue conversation avec une femme ».
Fin du carnet n° 1 terminé à Liverdun le 22 juin 1915
Carnet n° 2 : Henri Cazin quitte Liverdun le 23 juin. Après une étape à
Villers-en-Haye, il rejoint la forêt de Puvenelle le lendemain.
Samedi 26 : […] « On complète l’installation de plein vent. On entend fréquemment le canon du côté de l’Auberge St Pierre. […] Le campement est assez curieux comme aménagement. De grands abris couverts de terre et toute une quantité de petites huttes en feuillages ou toiles de tentes. Une chapelle est installée au pied d’un gros chêne. Une croix de bois clouée à l’arbre, un culot d’obus rempli de fleurs pour tout ornement. L’autel est formé de deux planches soutenues par des piquets, c’est réduit à la dernière simplicité.
Lundi 28 : […] « L’artillerie est assez active. L’ennemi déverse quantité de projectiles de gros calibre du côté de l’Auberge St Pierre »
Le 30 juin il quitte la région pour le front de l'Argonne.
http://lagrenouillememoire.blogspot.fr/2014/01/la-guerre-de-1914-1918-vecue-par-henri.html